ANTONIN ARTAUD
EL PESA NERVIOS
LE PÈSE-NERFS
lettres de ménage
cartas conyugales
1ª carta
Cada una de tus cartas aumenta la incomprensión y la estrechez de espíritu de las anteriores;
juzgas con tu sexo y no con tu pensamiento como lo hacen todas las mujeres. Confundirme yo,
con tus razones. ¡Te burlas! Pero lo que me irritaba era verte volver sobre las razones que
hacían tabla rasa sobre mis razonamientos, cuando uno de esos mismos te había llevado a
la evidencia. Todos tus razonamientos y tus infinitas disputas no podrán impedir que no sepas
nada de mi vida y que me condenes por un mínimo fragmento de ella misma. No debería siquiera
serme necesario justificarme ante ti si sólo fueras, tú misma, una mujer prudente y equilibrada,
pero tu imaginación te enloquece, una sensibilidad sobre aguda que no te permite enfrentar
la verdad.
Contigo cualquier discusión es imposible. Sólo me queda decirte una cosa: mi espíritu siempre
fue confuso, un achatamiento del cuerpo y del alma, esa suerte de contracción de todos mis nervios.
Si me hubieras visto hace algunos años, por períodos más o menos cercanos, antes aún de que
en mi se sospechara el uso del que tú me recriminas, dejarías de extrañarte, ahora, del retorno de
esos fenómenos. Si por otra parte estás convencida, si te parece que su reincidencia se debe
a ello, entonces no hay nada que decir, contra un sentimiento no se puede luchar.
De cualquier manera ya no puedo contar contigo en mi angustia, ya que te niegas a ocuparte de
la parte de mí más afectada: mi alma. No me has juzgado, por otra parte, nunca de otra manera
que por mi aspecto externo como hacen todas las mujeres, como hacen todos los imbéciles, cuando
lo que está más destruido, más arruinado es mi alma interior; y no puedo perdonarte eso, pues
las dos no siempre coinciden, desafortunadamente para mí. En cuanto a lo demás, te prohibo
hablar otra vez.
Lettre de ménage
Chacune de tes lettres renchérit sur l’incompréhension et la fermeture d’esprit des précédentes,
comme toutes les femmes tu juges avec ton sexe, non avec ta pensée. Moi, me troubler devant
tes raisons, tu veux rire ! Mais ce qui m’exaspérait c’était, quand l’un de mes raisonnements
t’avait amenée à l’évidence, de te voir, toi, te rejeter sur des raisons qui faisaient table rase de
mes raisonnements. Tous tes raisonnements et tes discussions infinies ne feront pas que tu ne
saches rien de ma vie et que tu me juges sur une toute [petite] partie d’elle-même. Je ne devrais
même pas avoir besoin de me justifier devant toi si seulement tu étais, toi-même, une femme
raisonnable et équilibrée, mais tu es affolée par ton imagination, par une sensibilité suraiguë
qui t’empêche de considérer en face la vérité.
Toute discussion est impossible avec toi. Je n’ai plus qu’une chose à te dire : c’est que j’ai toujours
eu ce désarroi de l’esprit, cet écrasement du corps et de l’âme, cette espèce de resserrement
de tous mes nerfs, à des périodes plus ou moins rapprochées ; et si tu m’avais vu il y a quelques
années, avant que je puisse être même suspecté de l’usage de ce que tu me reproches, tu ne
t’étonnerais plus, maintenant, de la réapparition de ces phénomènes. D’ailleurs, si tu es convaincue,
si tu sens que leur retour est dû à cela, il n’y a évidemment rien à te dire, on ne lutte pas contre
un sentiment.
Quoi qu’il en soit, je ne puis plus compter sur toi dans ma détresse, puisque tu refuses de te
préoccuper de la partie la plus atteinte en moi : mon âme. D’ailleurs, tu ne m’as jamais jugé
que sur mon apparence extérieure, comme font toutes les femmes, comme font tous les idiots,
alors que c’est mon âme intérieure qui est la plus détruite, la plus ruinée ; et cela je ne puis pas te
le pardonner, car les deux, malheureusement pour moi, ne coïncident pas toujours. Et pour le surplus,
je te défends de revenir là-dessus.
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